2016/08/17

Le monde des valeurs




Henri Makow a écrit un texte qui dit en résumé:
"Aujourd'hui, quand un jeune homme rencontre une jeune fille, ils ne font plus l'amour, ils couchent ensemble".
C'est très juste, comme tous ses écrits contre le féminisme, la perversion des moeurs, le communisme et l'homosexualité.

Cependant, il faut aller plus loin pour tenter d'expliquer cette déchéance contemporaine qui ne date que de cinquante ans !!

                                                                SG-2011

Ce n'est qu'en lisant les textes des romanciers* du 19ème siècle qu'on peut avoir une idée de la différence qui existe entre nous et nos aïeux. On s'aperçoit alors qu'à cette époque, et jusqu'au milieu du vingtième siècle environ, les hommes, les femmes et les enfants étaient profondément différents de ce que nous sommes devenus.

D'une part, l'enfance se passait dans les liens familiaux. La famille avait le respect d'elle-même, les adultes se respectaient eux-mêmes, respectaient les enfants et inversement. L'important de la vie se concentrait sur la cellule familiale. Il existait bien des activités en dehors mais celles-ci ne prenaient jamais le pas sur celles de l'intérieur. Bien sur, les individus n'étaient pas parfait mais leurs défauts mêmes n'altéraient pas les liens entre les éléments d'une famille quoiqu'elle ait à en souffrir.

Un enfant n'était jamais qu'un enfant tant qu'il n'avait pas les moyens de devenir adulte par l'acquisition d'un métier, la volonté et le courage de s'installer hors de chez lui. Jusque là, il restait enfant, c'est à dire étudiant de la vie chez ses parents. Or, ces enfants quelle que soit leur condition sociale et familiale arrivaient à l'adolescence avec une connaissance des valeurs fondamentales de la vie relativement complète et sans illusion. Ils avaient eu l'occasion de se former sur les beautés et les écueils de la vie sociale sans fausses espérances ni mauvais calculs, pour la majorité, car la société était uniformément représentée dans tous ses milieux par les bons et les mauvais côtés des individus.

L'enfant apprenait à juger les hommes car les hommes à cette époque avaient des valeurs morales qui primaient sur les valeurs matérielles. La famille, centre naturel de la représentation de ces valeurs était considérée pour elle-même, pour le rôle qu'elle doit jouer dans l'instruction d'un enfant, tout en ayant je le répète ses défauts inévitables qui pourtant ne détruisaient pas son importance première. Le but, l'accomplissement de ces valeurs, était interne et personne ne songeait à le renier ou à la modifier faute de l'atteindre.


Un des principes de cette vie oubliée était de dire à son enfant, non pas "tu as le droit de ou tu n'as pas le droit de..." mais "tu as le devoir de ...". L'apprentissage était actif et interne au lieu qu'il est devenu passif et externe. Il n'y avait pas de frein à l'imagination ni à la bonne volonté en proposant par des solutions extérieures des chemins tout tracés et des programmes à accomplir. Chaque enfant était libre de s'imaginer son avenir sans aucune limite autre que celle de respecter ses devoirs et sa famille.

En ceci, la société humaine correspondait encore à sa nature en donnant la primauté à ses valeurs et à son noyau vital. Ainsi, un 'petit d'homme' apprenait à devenir un homme par l'exemple de la même façon que les petits animaux apprennent tout de leurs parents et du groupe où ils sont nés afin de devenir des êtres représentatif de leur espèce. En ce temps, on apprenait comment devenir un homme, un honnête homme. Les valeurs étaient celles de la loyauté, de la reconnaissance, de la compassion, du courage, du respect, et, plus que tout, de la reconnaissance de ces valeurs pour ce qu'elles étaient, de leur primauté, et cela même si on les bafouait.

La recherche de la réussite, du plaisir, du pouvoir, de la gloire existait mais ne ternissait pas les valeurs fondamentales. Même si les passions empiétaient ou terrassaient les valeurs, celles-ci n'en disparaissaient pas pour autant. Ce qui faisait de la société un lieu éclairé où chacun pouvait progresser dans tel sens qu'il lui convenait en connaissant la valeur de sa conduite que ce soit dans le bien ou dans le mal. Il est certain que dans ce tableau, les différences étaient grandes et que selon l'environnement social et familial, les enfants recevaient de plus ou moins bonnes valeurs et devenaient des hommes et des femmes plus ou moins accomplis dans leur rôle d'être humain mais le fond du tissus social était malgré tout relativement uniforme de par l'acceptation générale de 'la valeur des valeurs'.

                                                                                                                        SG-2011

Maintenant, vous pourriez penser que le tableau que j'ai tenté bien imparfaitement de la société du 19ème siècle est encore trop rose et vous aurez raison. Mais mon but est principalement de constater que la société est telle que ce que les individus la font, et que ce principe remonte infailliblement à l'éducation des enfants au sein de leur famille originelle d'une part et des valeurs de la société à laquelle ils se trouvent progressivement confrontés car, rien ne sert d'élever un enfant sur des bases saines pour qu'il les rejette à son adolescence afin de suivre les travers d'un environnement en opposition avec les valeurs qui lui ont été inculquées, ce qui est le cas dans toutes les sociétés humaines quelles qu'elles soient.

Dans tous les cas, bien peu sont les parents qui imprimeront à leurs enfants des valeurs supérieures à celles qui prévalent autour d'eux pour différentes raisons dont la première est: "à quoi ça sert ?". Est-il possible et est-il juste d'élever un enfant en chevalier de l'honneur et de la bonté quand il trouvera autour de lui un peuple de traîtres et de lâches ? Le but de l'éducation étant de préparer son enfant à pouvoir trouver sa place dans la société, il serait aberrant de faire des saints qui devront faire leur places parmi des diables. Nous arrivons donc à un paradoxe qui voudrait qu'on réforme la société avant de pouvoir former des êtres humains dignes de ce nom alors que toute tentative dans ce sens, pour peu qu'il y en ai jamais eu, n'a jamais été un succès, sans quoi ... ça se verrait !

Nous arrivons donc fatalement à cette conclusion que je reprend d'un précédent texte que l'écueil majeur qui s'oppose à l'évolution de l'humanité est que: "C'est la société qui fait les hommes au lieu que ce soit les hommes qui forment la société". Est-ce une raison, en notre époque sens dessus dessous pour ne vouloir nourrir son enfant que des fausses valeurs établies sous prétexte que ce sont celles-ci qu'il aura à affronter et donc qu'il devra connaître à l'exclusion des autres ? Certainement non, mais, la tâche devient de plus en plus rude car tout concorde à notre époque à faire de ses anti-valeurs les seuls moyens, non seulement de réussite possible mais d'identification désirable.


NB le titre de ce texte est emprunté au livre d'un philosophe, épistémologue peu connu du début du vingtième siècle, Raymond Ruyer, auteur notamment de La gnose de Princeton.


* Alfred Assolant, Fortuné Du Boisgobey, Ernest Capendu, Eugène Chavette, Henri Conscience, Fenimore Cooper, Alphonse Daudet, Charles Dickens, Honoré De Balzac, Fiodor Dostoievski, Alexandre Dumas, Paul Féval, Emile Gaboriau, Aristide De Gondrecourt, Gontran Borys, Henri Cauvain, Emmanuel Gonzales, Henry Gréville, Jules Mary, Jack London, Auguste Maquet, Pierre-Joseph Ponson Du Terrail, Emile Richebourg, Alfred De Bréhat, Walter Scott, Frédéric Soulié, Eugène Sue, Daniel Defoe, Théophile Gautier, Paul Meurice, Narcisse-Achille De Salvandy, Félicien Mallefille.

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