2016/03/15

Pour ce que rire est le propre de Dieu (updated: monkey sees a magic trick)



L'homme naît confiant. Confiant en lui-même, confiant en son environnement naturel et humain. Ce n'est que contraint par l'expérience et forcé par sa propre sauvegarde qu'il troque sa confiance originelle pour de la méfiance. Ce n'est qu'à la suite de mensonges, de tromperies, de fausses promesses que le doute apparaît, ce doute malséant que certains ont osé poser en principe philosophique. Et quand vient le doute, il ne s'applique pas seulement à "l'autre" mais aussi à soi-même. Cependant, la confiance ne disparaît pas totalement mais elle change en quelque sorte de nature et passe d'un état de certitude à celui de possibilité éloignée. De qualité innée, elle devient une vertu à pratiquer, à conquérir, même.

Dans les difficultés, quand l'avenir devient obscur et le présent pesant, il y a au coeur de l'homme une fonction naturelle comme l'est la confiance, c'est l'espoir. L'espérance reste le souverain remède contre les aléas de la destinée. Quels que soient les symboles qu'on y attache, elle n'est pas plus que la confiance infaillible car elle repose sur un ensemble de points de repères qui peuvent successivement s'anéantir. Dans le cas où la confiance a disparu et où l'espérance s'est envolée, que reste t-il comme moteur de la vie d'un homme ? Combien de temps peut-on vivre sans confiance et sans espoir et ne pas devenir un automate qui pose un pas après l'autre dans un vide absolu ?

Eh bien, il reste à l'homme dans ce cas une ressource suprême, une arme décisive qui n'est pas sans danger en ce qu'elle peut amener la guérison où la folie, c'est le rire. Le rire a beaucoup de couleurs mais celui que j'évoque est autre. Ce n'est pas le rire provoqué par une cause extérieure et qui prends une forme connue, c'est le rire d'un enfant sur le siège du dentiste qui éclate parfois pour tromper la peur. C'est le sublime ressort de l'âme qui la fait se hausser au dessus de la réalité en lui rappelant que, pour être de 'ce monde', elle n'y est pas totalement liée. Ce type de rire rappelle à l'homme que sa vie présente n'est pas un absolu duquel il devrait tout attendre, tout espérer. Cette capacité est d'une certaine façon miraculeuse, 'hors nature'.

*

Car cette faculté n'est pas tout à fait le propre de l'homme comme l'affirmait pourtant très sensément le grand Rabelais mais bien une composante naturelle de la vie. Si les animaux ne rient pas à notre façon, c'est qu'ils n'en ont pas les moyens physiologiques (cf: Non, le rire n’est pas le propre de l’homme !). Cependant, le rire dont je parle pourrait bien pour sa part représenter ce que Rabelais avait l'intention de prouver comme étant la source la plus puissante de la sagesse, la substantifique moelle du bonheur sur terre qui donne à l'homme la possibilité de relativiser ses craintes et ses doutes en lui rappelant que son passage sur terre n'est qu'un épisode plus ou moins heureux de sa vie éternelle.



Amis lecteurs, qui ce livre lisez,
Despouillez vous de toute affection;
Et, le lisant, ne vous scandalisez:
Il ne contient mal ni infection.
Vray est qu'icy peu de perfection
Vous apprendrez, si non en cas de rire;
Aultre argument ne peut mon cueur elire,
Voyant le dueil qui vous mine et consomme :
Mieulx est de ris que de larmes escripre,
Pour ce que rire est le propre de l'homme.

Envoi au lecteur en exergue de Gargantua



Et maintenant, la preuve !!
174 millions de vues ...













No comments:

Post a Comment